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14 mars 2009
28 septembre 2009
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Autres vues aériennes d' Allaman
Les premières mentions du château d'Allaman ne remontent qu'à 1375, mais son origine est plus ancienne, étant donné sa position stratégique, surplombant la route qui relie Lausanne à Genève. De plus, les récentes investigations archéologiques ont mis au jour des maçonneries médiévales qui pourraient remonter au XIIIe ou au XIVe siècle.
Dès 1326, la seigneurie d'Allaman passe par mariage à Humbert de Rossillon, originaire du Pays de Gex et d'ascendance savoyarde, neveu de l'évêque de Lausanne Jean de Rossilon († 1341). En 1437, la terre et le château d'Allaman, fortement endettés, sont vendus à l'écuyer François de Russin, allié de la Savoie. Le château est visiblement transformé par la famille de Russin, probablement dans le dernier quart du XVe siècle (belle fenêtre à croisée de pierre actuellement murée datant de cette époque). En 1530, le château est incendié par les Bernois accourus au secours de Genève, menacée par la Savoie.
Il n'est pas aisé de reconstituer l'état médiéval du château d'Allaman, même si une partie de ses maçonneries remonte à cette époque, dont la façade sud, côté lac, où l'on a retrouvé un crénelage, des archères et un pigeonnier, ainsi que les premiers niveaux de la tour sud, ainsi que de la tourelle placée dans l'angle oriental. Cette forteresse formait probablement un grand quadrilatère autour d'une cour fermée, avec des tours ou des tourelles dans les angles.
On ne sait quelle fut l'ampleur des dégâts causés par l'incendie de 1530. Dans tous les cas, le château présente divers éléments qui pourraient dater du XVIe siècle (baies à accolade, encadrements chanfreinés, canonnières en trou de serrure…).
En 1546, la seigneurie d'Allaman est acquise par le notaire Louis Challet de Perroy, avant de passer en 1576 à Jacques Cerjat, seigneur de Denezy. De 1609 à 1617, le fils de ce dernier, Philippe, transforme considérablement le château, avec la reconstruction partielle de l'aile méridionale (façade sur cour avec arcades gothico-Renaissance et imposante charpente). Vers 1624, le chantier, probablement interrompu, reprend et l'on édifie de grandes caves voûtées en sous-sol et la façade sur cour de l'aile occidentale, dans le même style que celle de l'aile sud. La tour nord pourrait dater de la même campagne de travaux. A cet époque, un escalier en vis, placé à la jonction des deux ailes, dessert les différents niveaux du château.
En 1723, la marquise Jeanne Marguerite de Langallerie († en 1743) achète le château d'Allaman et procède à d'importants travaux de modernisation. Vers 1725, elle modifie l'aile occidentale et la tour nord, dont les belles charpentes datent de cette époque. Il est possible que l'escalier renfermé dans cette tour soit contemporain. A l'intérieur, quelques planchers sont de l'époque de la marquise, ainsi que les anciennes caves logées au rez-de-chaussée de l'aile méridionale (transformées au XIXe siècle en appartement).
En 1745, un plan cadastral montre le château avec sa cour accessible par un pont-levis, fermée par une dépendance agricole au nord-est, tandis qu'un moulin figure plus au nord au bord de l'Armary (dépendance et moulin démolis au XIXe siècle).
En 1755, Gaspard Sellon (1702-1785) achète le château au fils de la marquise de Langallerie. Issu d'une famille originaire de Nîmes et réfugiée à Genève pour cause de religion, il va entreprendre d'importants travaux à Allaman, dont la construction, vers 1757, de la façade d'entrée de style classique, abritant un escalier, la modification de la tour sud (charpente de 1762 environ), ainsi que la suppression des fossés et du pont-levis. On lui doit également l'édification de la dépendance rurale nord-est, encore visible de nos jours, ainsi que divers aménagements intérieurs de qualité (boiseries de style Louis XV, cheminées en marbre, poêles en faïence à carreaux bleus et grenat…).
En 1785, le château passe à Jean-François Sellon (1707-1790), frère de Gaspard, puis, en 1790, à son fils Jean (1736-1810), devenu comte du Saint-Empire germanique. Celui-ci procède vraisemblablement à de nouvelles transformations, tant extérieures qu'intérieures. De son époque datent vraisemblablement la belle série de boiseries de style Louis XVI enrichies d'appliques en bois sculpté attribuées à l'ornemaniste genevois Jean Jaquet (attention, certaines sont des copies des années 1940 !), de même que deux remarquables ensembles de papiers peints en arabesque des années 1790, de fabrication française.
En 1810, Jean-Jacques de Sellon (1782-1839) hérite du château d'Allaman. Cet homme, bien connu à son époque, est comte du Saint-Empire, chambellan de Napoléon et membre du Conseil souverain et représentatif de Genève. Philanthrope et humaniste, il fonde la Société de la Paix, en 1830, et milite ardemment pour l'abolition de la peine de mort.
Jean-Jacques de Sellon fit exécuter divers travaux dans son château d'Allaman, où il reçut, entre autres, Joseph Bonaparte, l'impératrice Joséphine, le duc de Bassano, qui y fut arrêté, Liszt, George Sand et Camille Cavour. En 1818-1819, il fait établir, par l'architecte Jean-Pierre Noblet un grand balcon sur la tour sud, aujourd'hui disparu. En 1825-1827, il transforme l'appartement du premier étage de l'aile occidentale, afin de « rendre l'habitation d'Allaman aussi confortable et aussi agréable que possible pour y être engagé à y faire de fréquents séjours ». Il précise, en outre, que tout sera mis en œuvre pour le « confortable, la commodité et rien pour le luxe ».
De plus, Jean-Jacques de Sellon réaménage les jardins. De 1810 à 1818, il perce une avenue depuis la place du village jusqu'à la cour du château, modifie le cours du ruisseau l'Armary et y aménage une cascade et une grotte en tuf. Il établit une rampe pour descendre dans le jardin anglais, nouvellement créé à l'emplacement de l'ancien potager, et fait fermer la cour du château, qu'il désire orner d'une fontaine néogothique.
A la mort de Jean-Jacques de Sellon, en 1839, un inventaire détaillé de ses biens permet de reconstituer l'affectation des différentes pièces de sa demeure et de connaître leur mobilier. Ainsi, le premier étage, soit le plus prestigieux, comprend, dans son aile occidentale, une chambre à deux lits doublée d'une chambre pour Monsieur et d'un cabinet, un grand salon et une salle de distribution des prix, aménagée par Jean-Jacques à l'emplacement d'une ancienne cuisine. La tour sud abrite un salon rouge, tandis que l'aile méridionale comporte, d'ouest en est, une salle à manger, un cabinet, une chambre rose, un cabinet voûté, une chambre jaune et, à son extrémité, un salon d'été, sans compter le couloir et le vestibule.
En 1839, les quatre filles de Jean-Jacques de Sellon héritent du château. Vers 1845, elles font démolir la dépendance agricole qui borde la cour au nord-est pour la reconstruire, en 1855, au bord de la route, à une certaine distance du château. En 1847-1848, l'extrémité de l'aile sud, ainsi dégagée, est rénovée dans le style néogothique alors en vogue dans la région. Sa façade nord-est s'encadre de deux tourelles dont l'une au moins est d'origine médiévale (côté lac),
Ces transformations de l'aile méridionale sont liées à la création d'un appartement neuf au rez-de-chaussée, à l'emplacement des anciennes caves de l'époque de la marquise. Ce logis est fait « au meilleur marché et en toute simplicité possible ».
Dès 1867, le château revient dans sa totalité à Hortense de Sellon (1821-1905), fille de Jean-Jacques, qui le lègue en 1905 à sa nièce, la comtesse Cécile de Loriol. Gérard de Loriol en hérite à son tour en 1934. Dans les années 1940, il restaure le château dans le goût néo-médiéval et en imitation de ce qui s'est fait au château de Chillon. De cette époque datent des peintures décoratives (faux appareils de pierre de taille rouge et blanc, motif de chevrons, blasons…), ainsi que des cheminées monumentales et des portes. En outre, Gérard de Loriol plaque divers éléments décoratifs sur les anciennes boiseries, le tout dans le style de Jean Jaquet. En 1975, le château est classé monument historique.
Après la mort de Gérard de Loriol, le domaine est racheté par la Société vinicole de Perroy, en 1976 puis, en 2005, par Markus Jerger, actuel propriétaire, qui le restaure depuis 2009 sous la direction des architectes Nicolas Delachaux et Denis Glatz, de Nyon.
Isabelle Roland
Historienne de l'architecture
Juin 2009
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