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Le château de Berthoud est l'un des rares grands châteaux forts féodaux de l'époque des Hohenstaufen qui ait conservé ses éléments de construction primitifs les plus importants. On est frappé par sa position dominante.
Les principaux bâtiments sont avant tout l'imposant donjon carré de 8,5 mètres de côté et de 33 mètres de haut, autrement dit la tour centrale de défense du Moyen Age, et l'énorme - et non moins imposant - corps de logis, un peu moins élevé et dont le plan dessine un rectangle de 9,35 mètres sur 20,8. A l'origine, ce bâtiment fut nommé "grande tour". Font également partie des principaux éléments de la forteresse d'antan quelques tronçons de l'enceinte, la tour-porte massive qui se dresse à l'ouest du site et le bâtiment adossé en équerre au corps d'habitation, dit "logis du bourgmestre". Lorsqu'il fut construit, il était destiné à abriter une grande halle féodale. Plus tard, il servit, comme le dit son nom, de demeure au bourgmestre et au XIXe siècle, il fut affecté à l'administration gouvernementale et judiciaire.
Burgdorf (Mérian XVIIe siècle)
L'histoire du château de Berthoud est vite exposée. La croupe rocheuse qui verrouille la vallée de l'Emme et domine de quelque 50 mètres ses terrains alluviaux, de même que la colline morainique qui lui est adossée à l'ouest étaient véritablement prédestinées à l'édification d'un ouvrage fortifié. La jolie légende - rapportée par le chroniqueur Justinger - des frères Sintram. et Baltram qui à l'aube du Moyen Age auraient tué un dragon au pied de la paroi rocheuse et permis ainsi le peuplement de la colline ne diffère guère des innombrables contes relatant la fondation d'agglomérations humaines. Les renseignements que nous fournit une autre chronique nous semblent plus plausibles. Elle parle de l'échec du siège d'un château "burgonde" occupé par des troupes zaehringeoises. Cela se serait passé pendant la Querelle des Investitures, en 1084, et les vaincus auraient été des partisans de l'empereur. Est-ce là une première mention d'une forteresse à Berthoud? Ce n'est pas impossible. Le fait que le duc Berthold de Rheinfelden auquel appartenait alors la bourgade est cité par son nom dans le texte en question semble en confirmer l'exactitude.
Le pont levis et sa mécanique
Il est probable que c'est aux Zaehringen, héritiers des seigneurs de Rheinfelden, que l'on doit les constructions du début du XlIe siècle. Il en est resté le tronçon de l'enceinte qui relie le donjon à la porte-tour. Le nom de "vieux marché" donné à la place non construite qui s'étend entre le château et le bourg supérieur, sur laquelle se tinrent aussi bien des marchés que des tournois, fait sans doute allusion au plus vieil ouvrage. On suppose qu'aux environs de 1200, les Zaehringen remanièrent le château et fondèrent en même temps le bourg supérieur et son église. Berthoud échut aux Kybourg en 1218 et aux comtes de Neu-Kybourg en 1273; ces derniers en firent l'un des centres de leur territoire. Ils agrandirent la ville en construisant une bourgade inférieure au pied nord de la colline de l'église. Ils surmontèrent les remous de plusieurs guerres, ils ne surent pas gérer leurs biens et se virent, après un siècle, dépouillés de tous leurs moyens. C'est la ville de Berne qui alors obtint Berthoud par achat, en même temps que Thoune.
Comme les habitants de Berthoud avaient pu en 1273 déjà s'assurer d'importants droits grâce à la charte de franchises que leur avaient accordée les comtes et comme Berne reconnut ces droits, Berthoud demeura une ville privilégiée par rapport à d'autres régions soumises aux Bernois. Ce qui eut d'heureuses répercussions sur l'évolution de la bourgade; nous pensons en particulier à l'essor que connurent l'artisanat et le commerce. Sous le règne des Bernois, la bourgade de Berthoud ne fut d'autre part jamais rattachée à un bailliage. Son administration incombait à un bourgmestre, un " Schultheiss ". Dès la fin du XlVe siècle et jusqu'à nos jours, le château servit de siège administratif, sauf pendant les années de la Révolution (1798-1804), pendant lesquelles il abrita l'institut pédagogique d'Henri Pestalozzi.
Les trois bâtiments de la première époque auxquels nous avons fait allusion plus haut -donjon, corps de logis et logis du bourgmestre - dénotent indéniablement dans leur extérieur une certaine ressemblance. Une ressemblance d'autant plus frappante que le matériel dont sont faits leurs murs, de la brique, est partout le même. On sait que l'abbaye de Saint-Urbain a fabriqué des briques à partir de la seconde moitié du XIIIe siècle. C'est sans doute la raison pour laquelle W. Meyer ne situe la construction des deux tours du château qu'à l'époque des Kybourg ou des Neu-Kybourg. Et pourtant de nombreux indices parleraient plutôt pour une édification vers 1200, donc sous le duc Berthold V de Zaehringen. Un examen approfondi des poutres de chêne et de sapin a permis de constater qu'elles avaient été posées à l'époque en question. De plus, l'étude du façonnage des pierres du corps de logis a donné des résultats analogues. Nous savons d'autre part qu'au cours des luttes qui opposèrent les ducs de Zaehringen à la noblesse savoyarde, aux environs de 1190, l'importance de Berthoud s'accrut considérablement. A ce propos, l'un des documents les plus significatifs, c'est le sceau de la ville qui, daté de 1257, montre déjà deux tours.
Dans son histoire du château de Berthoud, J. Schweizer groupe les différentes phases de construction en un tout. L'ouvrage central, qui forme à peu près un triangle rectangle de 130 mètres de long et de 50 mètres de large au maximum et qui, à l'ouest, est délimité par un avant-château presque aussi grand, fut doté à l'époque kybourgeoise du mur-boucher septentrional, flanqué de deux tours semi-circulaires, et d'une entrée gothique. Après avoir été murée pendant un certain temps, cette dernière fut rouverte. La chapelle domestique englobée dans le corps de logis a été rénovée; de ses fenêtres rondes encadrant une tour d'escalier des XVIe et XVIIe siècles, le regard plonge dans la cour du château. Sous le règne de Berne, la halle construite par les Zaehringen fut incorporée au logis du bourgmestre. Datent en outre du XVIIIe siècle un grenier de belle apparence, transformé par la suite en bâtiment administratif, de même que le corps qui relie les deux tours. L'aspect de l'avant-château est surtout marqué par la porte-tour qui, témoin d'une technique de défense nouvelle, remplaça vers 1560 une construction antérieure.
Outre le vieux puits couvert de l'avant-château, percé dans le grès à une profondeur de 48 mètres et connu depuis longtemps, on a récemment mis au jour un autre réservoir et distributeur d'eau, au milieu de la pente rocheuse et escarpée du sud-ouest de la colline, à un endroit où l'on ne s'attendait vraiment pas à trouver une telle installation. On suppose que c'est elle la plus vieille. Profonde de 25 mètres seulement et creusée à mi-hauteur de la paroi rocheuse, elle épargna aux ouvriers le pénible travail du forage de la roche et, par sa position excentrique, menait sans doute aussi à des couches phréatiques. Les habitants d'alors semblent s'être accomodés des inconvénients que représentaient un long transport et un manque de protection.
Cette citerne fut découverte au cours des vastes travaux entrepris entre 1974 et 1981 pour consolider les parties de rocher et les murs du château qui menaçaient de s'écrouler. Ces travaux exigèrent l'élimination d'un épais fourré d'arbres et d'arbustes, un fourré qui longtemps donna son empreinte à l'image du front sud-ouest du château. On sait que jusqu'à la guerre des Paysans (1653), probablement même jusqu'au XVIIIe siècle, la végétation fut régulièrement coupée, car elle allait à l'encontre du sens et du but de la forteresse. Il est vrai que maintenant, de nouvelles plantes commencent à sortir de poches de terre et de bacs habilement placés dans les parois rocheuses. Lors des travaux d'assainissement, il a également été possible de rétablir le sentier dit "des pauvres pêcheurs", qui permettait d'accéder au château sans passer par la ville. C'est lui que suivaient les malfaiteurs condamnés à mort lorsqu'ils devaient se rendre du château au lieu de leur exécution. D'où son nom!
Grâce aux travaux dont nous venons de parler - et cela nous paraît particulièrement important pour l'histoire de la construction du château - il a été possible de dégager la façade sud du logis du bourgmestre, l'actuel tribunal, et de l'étudier à fond. Ce qui a permis d'établir que c'est avec raison qu'on supposait que cette partie du château était à l'origine une grande et imposante halle et qu'elle avait été conçue par les Zaehringen. Les vestiges du bâtiment roman tardif de 1200 et des constructions érigées au XIIIe siècle sous les Kybourg ont pu être reproduits sous forme de dessins. La halle peut être considérée comme l'un des rares témoins en Suisse d'un édifice princier à caractère représentatif.
En même temps, une autre constatation intéressante a pu être faite:
Les briques du corps de logis n'ont pas été posées directement sur la molasse, mais sur une couche de calcaire du Jura soleurois solidement enfoncée dans le grès. Cette couche calcaire fut même encore recouverte de tuf, ce qui devait faciliter l'évaporation d'une éventuelle humidité.
La dernière découverte fut celle du pont qui franchissait le fossé près de la grande tour-porte, un pont rénové en 1581. Comme on a pu le constater, son arche en tuf, enfoncée dans un tas de décombres depuis le XIXe siècle, était demeurée intacte. C'est elle - et non le déblai - qui supportait le poids de la chaussée et de toutes ses charges, même celui de lourds camions. Le pont a été dégagé et réparé et en même temps, on a refait le fossé, chef-d'uvre technique du Moyen Age.
Ce qui sans doute captivera le plus le visiteur, ce sont les plus anciennes parties centrales, auxquelles on accède par la cour intérieure. Le donjon n'a jamais été habité. On ne reconnaît son entrée haute primitive, pratiquée dans l'angle sud-est, qu'à un arceau muré qu'on aperçoit de l'intérieur, des combles du corps intermédiaire. Aujourd'hui, on pénètre dans la tour par une nouvelle porte. Les différents étages du donjon, l'aile nord qui lui est adossée et les étages supérieurs du corps de logis abritent maintenant les intéressantes collections historiques et folkloriques d'une société de Berthoud, la "Rittersaalverein". Depuis que le corps de logis, un imposant bâtiment d'habitation comparable à un donjon français de Normandie, a été restauré, en 1972-73, d'intéressants détails de sa maçonnerie originale en brique et de sa superstructure de style roman sont visibles. La salle des chevaliers, qui se trouve au deuxième étage, et la chapelle domestique ornée de splendides peintures murales du XIVe siècle valent elles aussi la peine d'être vues.
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