Autres vues aériennes du Château et de Porrentruy
Jusqu'au début de l'époque carolingienne, l'Ajoie appartint aux comtes d'Alsace. Peu peuplée, cette région attira pendant longtemps de nombreux colonisateurs. Lors du partage de la Lotharingie, en 870, l'Ajoie échut à Louis le Germanique. Peu à peu, des familles de la petite noblesse, dispersées dans tout le pays, défrichèrent des terres incultes et érigèrent de modestes châteaux. Ce n'est que plus tard qu'elles les agrandirent pour en faire des maisons fortes.
Des documents attestent depuis le début du Moyen Age déjà l'existence d'une cour domaniale royale au pied de la colline occupée par le château de Porrentruy. Elle était habitée par une famille de la noblesse locale, plus soucieuse de ses propres affaires que de celles d'un roi lointain. Vers 1150, la cour fut prise d'assaut par les comtes de Montbéliard; un siècle plus tard, ils construisirent sur la colline un puissant ouvrage défensif, dont le donjon circulaire a subsisté jusqu'à aujourd'hui. Lorsque la maison des Montbéliard se divisa, la seigneurie et le château revinrent aux comtes de Ferrette; ils les conservèrent pendant un siècle. Puis les deux branches se réunirent à nouveau, mais eurent des différends à propos de certains biens. Un troisième homme de la haute société se mêla à leurs luttes, l'évêque de Bâle.
L'Ajoie, plus étendue à cette époque qu'aujourd'hui, comptait différentes institutions religieuses. Rodolphe III, le dernier roi de Haute-Bourgogne, en fit don, avec quelques autres biens, à l'évêque de Bâle. Comme les évêques issus des maisons d'Asuel et de Neuchâtel avaient eux aussi donné à l'Eglise de Bâle des terres provenant de leurs patrimoines respectifs, l'évêché posséda avec le temps presque toute l'Ajoie. Et lorsque le prélat fut de plus élevé à la dignité de prince, il devint pour la noblesse de la région un personnage politique si important qu'il aurait été dangereux de passer outre à son autorité.
L'existence de tant de seigneurs rivaux ne pouvait qu'engendrer tôt ou tard des hostilités. En 1270, un tribunal arbitral attribua la seigneurie de Porrentruy au prélat. Mais cela ne ramena pas la paix. Dix ans plus tard, les comtes de Ferrette renoncèrent, contre une forte indemnité, à leurs prétentions et à leurs droits. Un de leurs parents, Reinhold de Bourgogne, ne voulut toutefois pas accepter cet arrangement et s'empara de la ville fortifiée qui peu à peu s'était formée au pied du château. L'évêque appela Rodolphe de Habsbourg à son secours. Pendant six semaines, les troupes autrichiennes occupèrent Porrentruy et laissèrent ses habitants mourir de faim. Reinhold finit par se rendre et, en 1283, renonça au profit de l'évêque au château et à la ville, de même qu'à tous les droits, protectorats et bailliages en découlant. Dès ce moment, les évêques bâlois furent considérés comme les seuls propriétaires de l'Ajoie et du centre seigneurial de Porrentruy et résidèrent souvent au château.
La plupart des prélats firent grand étalage de luxe et dépensèrent ainsi d'énormes sommes d'argent. En 1386, l'évêque Inder de Ramstein dut vendre toute l'Ajoie, Porrentruy et son château y compris, au comte Etienne de Montbéliard pour 11'000 florins. Il se réserva, il est vrai, le droit de rachat. Ce n'est toutefois qu'en 1461 que l'évêque Jean de Venningen put réacquérir le tout, pour le double montant.
Après que Bâle eut adopté la Réforme, les évêques transférèrent définitivement leur siège à Porrentruy. L'évêché ne possédait plus de cathédrale et les chanoines résidèrent à Fribourg en Brisgau jusqu'à ce qu'aient été construits à Arlesheim un nouveau sanctuaire et quelques immeubles d'habitation. Mais même à ce moment-là, les évêques continuèrent à demeurer à Porrentruy, où ils firent construire plusieurs églises, couvents et écoles. Avec tous les fonctionnaires ecclésiastiques et séculiers qu'elle abritait, la petite ville devint un important centre culturel. Aujourd'hui encore, de nombreux édifices témoignent de la richesse et du sens esthétique, mais aussi de la générosité des nobles qui servirent la cour épiscopale. Une fin brutale fut mise à cette idyllique vie agreste lorsque, pendant la guerre de Trente Ans, les Suédois entrèrent en Ajoie. Le prince-évêque s'enfuit, plusieurs localités furent rasées, le pays pillé, la ville de Porrentruy assiégée et occupée. De lourds impôts de guerre réduisirent à néant la plupart des fortunes. Ce n'est qu'après la signature de la paix que la paisible vie d'autrefois put lentement reprendre. Puis vinrent les guerres de conquête de Louis XIV et à nouveau, le pays eut à souffrir de la présence de troupes étrangères. Certes, une alliance préserva les Confédérés du pire, mais pour les personnes touchées, les pertes furent malgré tout sensibles.
Le donjon (La tour Réfous)
Depuis le donjon
Lorsque les troupes révolutionnaires françaises entrèrent en Ajoie, en 1792, le dernier prince-évêque, Joseph Sigismond de Roggenbach, quitta le château et la ville de Porrentruy. Son départ signifia non seulement la fin de l'histoire du château en tant que forteresse et résidence, mais encore celle d'un long chapitre de l'histoire de l'Ajoie.
Aujourd'hui, le château, qui a été restauré, est occupé par les autorités administratives et judiciaires de la ville.
La visite de la Tour Réfous peut se faire librement.
La ville depuis le donjon
Vue depuis le donjon
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