Jura : le château de St Ursanne (auf deutsch)

Autres vues aériennes de St Ursanne

Le château est sur la crête

En montant vers le château

Les ruines de ce château sont situées sur une crête de rochers au-dessus de la petite ville de ce nom. On voit, sur une plateforme assez vaste, quelques parois de murailles recouvertes de broussailles, quelques traces de fossés. C'est tout ce qui reste de l'ancien château de Saint Ursanne.

Ce manoir occupe, selon toute probabilité, l'emplacement d'un poste romain, d'une specula, qui dut servir d'intermédiaire entre les positions romaines d'Outremont et de Chételay qui faisaient partie de tout le système de défense établi par les maîtres du monde pour protéger leurs communications entre Vesontio (Besançon) et Augusta Rauracorum. Cette hypothèse, dit Mgr Chèvre dans son bel ouvrage sur la Prévôté de Saint-Ursanne, ne manque pas de fondement et se justifie par la stratégie romaine.

Ravagés par les Vandales et les autres barbares au commencement du Ve siècle, gâtés par les Allemands, renversés ou transformés par nos ancêtres eux-mêmes, beaucoup d'anciens édifices romains ont servi de fondements à des châteaux du moyen-âge. Les nobles de cette époque, trouvant des retranchements tout préparés, y ont construit leurs manoirs et leurs demeures seigneuriales.

Telle a dû être l'origine de la forteresse de Saint-Ursanne. Une famille noble, descendant probablement de celle de Gliers, souche du Montjoie, existait à Saint-Ursanne aux XIIe et XIIIe siècles. Cette noblesse a tout naturellement établi son castel sur les ruines des établissements antérieurs soit romains, soit peut-être même burgondes ou francs. On trouve en 1173, Henri et Albert de Saint-Ursanne; en 1203, Lambert et Gérard de Saint-Ursanne; en 1210, Simon de Saint-Ursanne et son frère Wilhelm. Conon de Saint- Ursanne était chanoine de Bâle en 1270. Cette famille n'avait aucune juridiction dans la ville, ses droits consistaient en privilèges honorifiques, comme d'avoir un banc armorié à l'église, le pas aux processions, etc.

Au XIVe siècle, le château de Saint-Ursanne appartenait déjà à l'évêque de Bâle et les nobles de Saint-Ursanne s'éteignirent à la fin de ce même siècle. Ces nobles avaient pour armes: de gueules à deux clefs d'argent en sautoir. L'héritage de cette famille éteinte passa, selon les usages féodaux de l'époque, au suzerain, l'évêque de Bâle. Toutefois ce n'est qu'en janvier 1333 qu'il est fait mention, dans nos actes, pour la première fois, du castel de Saint-Ursanne. A cette époque, Jean de Châlons, évêque de Bâle, signe un jugement rendu au château de Saint-Ursanne. L'évê- que de Bâle était donc, à la date du 18 janvier 1333, en possession de cette forteresse. Le 1er février 1337, Jean Senn de Münzingen était au château de Saint-Ursanne "in castro nostro sancti Ursicini" où il arrive accompagné des représentants de son Chapitre, le Prévôt Thuring de Ramstein et le doyen Jacques de Wattenwiler. Là il emprunte à Guillaume de Bremoncourt une somme de mille florins d'or pour reconstruire son château de Porrentruy, détruit par un incendie. En 1373, l'évêque de Bâle, Jean de Vienne, était "en son castel de Saint-Ursanne" où Jean d'Aarberg, sire de Valangin était venu le trouver. Jean de Vienne rend à ce dernier les fiefs que tenaient déjà de l'église de Bâle les prédécesseurs de Jean d'Aarberg. Ne pouvant faire face aux dépenses de l'Evêché, occasionnées par ses guerres, Jean de Vienne se vit forcé d'hypothéquer, en 1376, le château de Saint-Ursanne, à son cousin Jean de Vienne, sire de Roulans et amiral de France. Trois ans après son élévation au siège épiscopal de Bâle, Imier de Ramstein se hâta de dégager le château et la ville de Saint-Ursanne des mains du sire de Roulans, en lui remboursant la somme prêtée. Jean de Vienne avait laissé une dette de quatre mille florins; pour la couvrir, Imier de Ramstein se vit obligé d'engager de nouveau, en 1384, aux bourgeois de Bâle, son château de Saint-Ursanne. Quatre ans plus tard, les 4000 florins étaient remboursés, mais l'hypothèque était transférée à Thiébaud VIII, comte de Neuchâtel, pour 8000 florins. Celui-ci, engagea le château de Saint-Ursanne à Jean Spitz de Bâle pour 133 florins de revenu. En 1404, Humbert de Neuchâtel, évêque de Bâle libéra le château et reporta la somme de 133 florins sur la chancellerie de l'Evêché qui dût la payer chaque année, le jour de Saint Nicolas (20 décembre 1404). Thiébaud VIII bien que remboursé, ne voulut pas renoncer à la prétention d'être et de demeurer seigneur de Saint-Ursanne. Il fallut, plus de vingt ans après (1426) toute l'énergie de Jean de Fleckenstein, évêque de Bâle, pour mettre à la raison le comte de Neuchâtel, par la force des armes.

Une belle nuit, le nouvel évêque, secondé par les Bâlois et le sire de Montjoie, envoya six cents hommes sous la conduite du comte de Thierstein s'emparer du château et de la ville de Saint-Ursanne et peu après des châteaux de Pleujouse, de Roche-d'Or et de Spiegelberg (1425). Après une année de guerre, demeura vainqueur et l'intraitable Thiébaud VIII fut obligé de rendre définitivement à l'évêque la ville et le château de Saint-Ursanne, qu'il avait possédé pendant trente-cinq ans. Depuis cette conquête jusqu'à la guerre de Trente ans, le château et la ville de Saint- Ursanne demeurèrent paisible possession de l'Evêché de Bâle.

C'est de cette époque que date l'établissement des châtelains de Saint-Ursanne, nommés par l'évêque. Le premier châtelain figure en 1379, c'est Joseph Hatzler. On voit également un Pétermann de Tavannes en 1458, un Henri de Montsevelier en 1479. Dans le catalogue de ces châtelains on trouve des nobles de Buix, de Wartensee de Rambévaux, de Rinck de Baldenstein, de Neveu, de Grandvillers, etc…

Quoique perdu dans les rochers du Doubs, le château de Saint-Ursanne, comme la petite cité, n'échappa pas à l'invasion des impériaux, des Français et des Suédois, pendant l'horrible guerre de Trente ans. Au mois de mai 1634, malgré l'opposition de l'évêque, le marquis de Bourbonne fit occuper le château et la ville par une garnison de soldats français, qui s'y signalèrent par d'odieux excès. Ces troupes, sous le commandement de deux Ecossais Forbes et Hébron, à peine installés au château, traitèrent les habitants de la ville avec une telle cruauté, que poussés à bout, ne prenant conseil que de leur désespoir, ceux-ci montèrent, une belle nuit, au château et massacrèrent leurs hôtes impitoyables, à la réserve de douze qui furent sauvés par les gens du suffragant de Bâle.

Le comte de la Suze, averti lui-même, voulait faire pendre tous ceux qui avaient pris part au massacre. L'évêque refusa cette satisfaction et le comte se prépara à mettre le feu à Saint-Ursanne. Les cantons catholiques interposèrent leurs bons offices auprès du roi de France et l'affaire en resta là. Une poignée d'impériaux s'installèrent au château et bravèrent les Suédois et les Français. Ils interceptèrent fréquemment les convois de grains et d'autres munitions venant de Suisse pour l'entretien des troupes françaises et suédoises qui occupaient les places de la Franche-Comté.

Le 11 mars 1637, le comte de Grancey, gouverneur de Montbéliard, pour la France, vint investir le château et la ville de Saint- Ursanne. Les Français tirèrent, avec des peines inouïes, sur le rocher qui domine le château, du côté d'Outremont, des pièces de canon de gros calibre et le bombardement commença. Trop faibles pour résister à ces forces supérieures, les bourgeois se sauvèrent dans les montagnes, où les femmes et les enfants étaient déjà en sûreté. La garnison du château demanda à capituler. Le comte de Grancey leur ayant accordé la vie sauve, les impériaux déposèrent les armes et se retirèrent. La ville fut livrée au pillage, sauf la collégiale et la maison du suffragant. La prise de Saint-Ursanne fut annoncée dans toute l'Europe comme un des plus grands événements de cette terrible guerre de Trente ans, comme la prise d'une ville les plus fortes et des plus importantes.

Pour donner encore plus de force à leur vantardise, les Français firent graver une vue de Saint-Ursanne entourée de formidables fortifications que baignaient de toutes parts les eaux du Doubs et munies de bastions et d'avant postes qui devaient en faire une ville de guerre de premier ordre.

Après avoir fait réparer les brèches des murs, le comte de Grandcey laissa, au château, deux compagnies d'infanterie dont il confia la garde à M. de Vignancourt qui soutint un siège avec honneur. Le roi de France honora cet officier d'avoir si vaillamment défendu le château de Saint-Ursanne. La garnison franco-suédoise ne quitta ce château qu'après le traité de Westphalie, en 1648.

Saint-Ursanne rentra en la possession de l'évêque de Bâle, mais ruiné presque de fond en comble. Il fallut plusieurs années à cette petite ville pour se remettre de ce désastre. En 1674, craignant de nouveau une invasion, le Prince fit fortifier le château et rétablir les murs de la ville. La forteresse reçut quatre anciennes pièces d'artillerie et fut munie de tous les engins propres à soutenir un nouveau siège. On en fut quitte pour la peur. Jusqu'en 1792, le château de Saint-Ursanne demeura paisible possession de nos évêques. Il ne servit plus guère que de résidence au forestier du Prince et à sa modeste famille.

Lorsque la révolution vint ruiner le pouvoir temporel des évêques de Bâle, le château et la ville furent occupés en avril 1792, par un bataillon de volontaires de la Corrèze, appartenant à l'armée de Custine. Après eux parurent les volontaires du Haut-Rhin, commandés par le fougueux Rosswag. Ce ne fut que cinq ans après que Saint- Ursanne fut délivré des troupes révolutionnaires de France. En 1796, le château fut vendu, comme bien de la nation à Huvelin de Bavillier, de Belfort qui le fit démolir. Les pierres servirent en 1827, à la construction d'une filature de coton. En 1852, ce bâtiment devint la proie des flammes. Telle fut la fin de la forteresse de Saint- Ursanne, qui joua un rôle important dans les fastes de l'Evêché de Bâle.

Aujourd'hui, on peut encore voir quelques murs et vestiges de tour au sommet d'une crête rocheuse qui surplombe le village de St Ursanne.

La vue est très belle depuis ce sommet.


vestiges de murs


Le cloître:


Bibliographie

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